« Le grand nord n’est pas simplement beau. Il est puissant. Sa puissance découle de la tension entre sa beauté évidente et son pouvoir de prendre des vies. » Barry Lopez
Juin 1994, diplôme en poche, les portes de la liberté s’ouvrent. Arnaud enchaîne des remplacements de kiné avec des semaines en montagne où, en mars 1995, il rencontre Rodolphe André. Une journée de tempête sur des versants exposés va souder les deux hommes qui décident de partir ensemble au Canada pour explorer le grand nord. Le départ est fixé au 28 août pour le Parc national Auyuittuq, un des plus beaux endroits de l’Arctique canadien où culminent des montagnes d’une beauté exceptionnelle.
Ils s’engagent le 12 septembre, seuls, pour deux mois d’aventure en autonomie avec 130 kg de matériel répartis sur leur dos. À leur départ du village de Pangnirtung, ils croisent les gardes du Parc qui le ferment pour toute la période hivernale jusqu’en juin. Ces derniers préviennent les deux hommes qu’ils n’auront désormais aucune aide possible car il n’y a ni hélicoptère ni engin capable de les secourir en cas de problème. Arnaud et Rodolphe n’ont pas d’arme et les gardes les avertissent qu’un ours blanc rôde dans les parages. Afin de dissuader les deux novices, les gardes leur demandent leur itinéraire pour savoir où récupérer leurs corps quand la motoneige sera réutilisable !
Ils s’engagent, plus conscients du danger qu’ils ne connaissent pas encore. Ce jour-là, ils marcheront une vingtaine de km jusqu’à tomber sur une tente, dans laquelle ils découvrent deux autres Français qui passent leur dernière nuit. Première rencontre avec Patrick Rainsard qui deviendra par la suite un grand ami d’Arnaud.
Au final, ils vont passer deux mois à grimper sur Thor, Asgard, Odin, dieux scandinaves qui nomment les plus beaux pics de la région, et à sillonner sous les premières neiges les glaciers de la calotte glaciaire Penny, qui jalonnent ces montagnes.
Ils rentreront en novembre au moment où la nuit polaire s’installe, drapée d’incroyables aurores boréales qui marqueront profondément les deux hommes.
Malgré les 10 kg perdus par chacun, le froid mordant (-20° à -30°) et les difficultés du terrain rocailleux, Arnaud et Rodolphe rêvent déjà de repartir vers des destinations polaires encore plus engagées. La fièvre du froid polaire les a gagnés !